Mataf


Angela traverse la salle et se rend dans le hall pour accueillir les visiteurs. Le gardien de la MJC lit un journal, page des sports, un stylo à la main, cochant des noms, des dates, pour ses paris du week-end. Un yucca d’intérieur placide s’assoupit mollement, trop arrosé, abruti par les bruits des enfants qui de 18 heures à 20 heures se succèdent en allant ou en quittant les cours. Sans compter le shoot quotidien de la femme de ménage qui lui met un petit coup de vapo sur les feuilles pour lui donner bonne mine (mélange de sa composition : 1/3 Javel, 1/3 produits à carreaux, 1/3 alcool à 90°).
Viens boire un verre à l’œil, avais-je proposé.
Mataf a l’air aussi à l’aise qu’un flamant rose au milieu d’une rave-party BBR, lorsque les pogoteurs lèvent un poing luisant en criant Oï Oï pour accompagner un refrain du genre tolérance ! trahisons ! contre la nation !
— Salut.
— C’est quoi ce souk ? Vous faites une animation troisième âge ?
Le temps de revenir vers Mataf, un verre à la main, un bras s’est abattu sur son épaule. Le directeur de cabinet.
— Alors, jeune homme ? Ce travail ? On est à la hauteur ? Charles, vous connaissez notre employé ?
Tendre le verre en plastique à Mataf.
— C’est moi qui lui ai trouvé cet emploi. La MJC, c’est mieux que rien. Hein ? C’était ça ou quoi ? La délinquance ! Ça vous pendait au nez, ayez le courage de le reconnaître !
Le directeur de cabinet est euphorique. C’est commencé. Ça avance. Sous contrôle. Le bon contrôle, celui qui grade le maître d’œuvre. Mataf s’est doucement affaissé sous le poids de la main. Légère pâleur.
Il faut encore cinq minutes pour s’en débarrasser.


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