Bio goths

 — Non, mais regarde-moi cette saloperie ! Putain ! Ils peuvent pas jouer ailleurs !
Début de journée. Pas un chat. Même pas un vieux, avec un œil crevé.
La vitrine du tout nouveau bureau de l’office HLM est grumelée de marques noires séchées.
— Pas question que je nettoie cette merde ! Tu m’entends ! Pas question !
Angela est furax. Elle lâche ses clés deux fois par terre. Balance un coup de pied dans la porte en verre, et on l’entend continuer à hurler, par intermittence.

Ça ne ressemble pourtant pas à des marques de ballon.

Il est trop tôt pour appeler GTA, qui doit à cette heure jouer à saute-mouton avec ses rêves.

Gratter légèrement la vitre.
Les saletés, sèches, se détachent facilement, laissant juste une traînée noire après elles.
De la terre.
La façade a été mitraillée avec de la terre.
— C’est pas des joueurs de ballboxe.
— Qu’ils jouent au foot ou au basket, je m’en bas la race.
— Tu t’en quoi ?
— Laisse faire, je vais m’en occuper.
— C’est de la terre sur les vitres. Ça vaut signature. C’est un coup des bio goths.
— Des quoi ?
— Je croyais que tu avais lu mon étude ?
— C’est long, j’ai sauté des pages.
— Les bio goths sont des activistes. Des écolos sans pitié. En lutte contre le goudron, le verre, les graviers.
— On dirait que ça t’amuse.
— Leur lutte n’est pas sans beauté.
— Vas-y, donne-leur raison. C’est toi qui vas laver ? Toi, tu t’en fous, mais moi je suis supposée faire un showroom, ici. Pas le salon de l’agriculture.
— OK. Je vais essayer de leur parler.
Dehors, toujours personne.
Muni d’un vieux balai récupéré au fond du cagibi, frotter la vitre et rassembler en tas.
Les petites graines sont clairement visibles au milieu des éclats. Seed bombs. Des grenades faites maison, explosant au contact, libérant leur contenu : graine de cactus, chiendent, orties.

Chaque Cité pourrait être leur cible.


rebondir : la Chlorophylline, Evil Ent, Green Slayer, Humungus, MOD, No Life, 666